Rendez-vous avec le druide

Lorsque le son de la clochette de la porte de la boulangerie retentit, Merin se redressa brutalement. Il déboula dans la boutique.

Il reconnut imédiatement le druide, et le salua.

"Bienvenue à vous. Veuillez pardonner l'apparence de ma modeste boutique..."

Il tendit le bras vers l'arrière, désignant l'arrière-boutique.

"Je vous en prie, entrez. Le coffre est là-bas."

Helio salua le boulanger d'un signe de tête mais il ne dit pas un mot. Il n'était de toute façon pas doué pour la conversation.
Il entra dans l'arrière boutique et s'immobilisa.
Le coffre était là...
Il n'avait l'air de rien ce coffre...
Helio ne savait pas par où commencer. Il aurait du mal à convaincre le boulanger, d'autant plus qu'il ne bénéficiait d'aucun soutien...
Pourtant, Helio ne voulait pas tomber dans l'illégalité, il était donc obligé d'essayer de convaincre Merin...

"Vous êtes au courant? Pour les créatures de la forêt?"

Merin crut avoir mal compris.

"Les... ? Je vous demande pardon ?"

Au vu de l'air grave que prenait le druide, il devina que ce coffre était bien plus que ce qu'il n'avait cru au départ. Il commença à se demander s'il n'aurait pas mieux fait de le laisser au druide et de ne plus s'en soucier... Mais son sens de la justice et de la loyauté, ainsi qu'un léger pressentiment, le poussaient à s'intéresser à cette affaire.

Voilà qui compliquait encore la chose... Helio était obligé de lui expliquer la situation lui-même, ce qui n'était pas du tout à son avantage...

"Donc, vous n'êtes pas au courant? Très bien."

Le druide soupira puis commença à expliquer ce qui se passait en ce moment à Voxifera, tout en ne quittant pas le coffre des yeux.

"Dernièrement, de nombreux hommes de Voxifera ont disparu. Ils ont tous disparu alors qu'ils étaient dans la forêt environnante.
Je passe beaucoup de temps dans cette forêt et j'ai justement remarqué la présence de créatures... Des créatures inhabituelles, qui n'ont pas leur place dans notre monde."

Helio resta silencieux pendant quelques secondes, repensant douloureusement au fait qu'il n'avait pas une seule véritable preuve.

"J'ai trouvé des traces de pas petites et fines de créatures à forme humaine, plus ou moins en tout cas, qui se déplacent en file indienne.
Tout cela, je l'ai expliqué au Roi et à la Reine lors des doléances. Ils m'ont chargé de faire des recherches dans la bibliothèque pendant qu'ils regrouperaient des volontaires de sexe féminin pour faire une expédition dans la forêt.
Dans la bibliothèque, j'ai pu confirmer mes doutes.
Les créatures de la forêt sont des créatures ressemblant à des femmes séduisantes qui se nourrissent de chaire humaine. Ces créatures ne viennent pas de notre monde. Elles viennent de l'Au-Delà."

Helio sentit son estomac se contracter. Il l'avait dit. Si ça avait été le prêtre de la ville qui l'écoutait, il aurait pu être certain de brûler vif le lendemain sur la Grand-Place...

Sans oser regarder Merin, Helio attendit sa réaction avant de poursuivre son explication.

Merin avait très certainement un regard un peu éteint, ce qui devait lui conférer un air asse stupide. Il bouillonnait intérieurement.

Il sentait que quelque chose le poussait vers cette aventure, cependant sa raison l'en empêchait. Depuis toujours, dans ses rêves de gamin, il s'imaginait combattant des chimères, résolvant des énigmes tordues, ou sauvant une belle princesse des flammes. Mais en grandissant, il avait appris à brider cette imagination trop fertile, et à penser "concret".

Il savait pertinemment qu'il devait absolument continuer son petit train de vie, rythmée par les fournées et le "ting-ling" de la clochette de la porte.

Mais au fond de lui, il sentait qu'il avait besoin de partir à l'aventure. Quelque chose en lui lui disait que c'était sa nature.


La gorge nouée par tant de contradictions, il articula péniblement :

"D... Dites m'en plus..."

Un peu soulagé, Helio poursuivit son discours.

"Sur ce, vous êtes arrivé, avec ce coffre sous le bras à la bibliothèque. Vous m'avez laissé l'examiner de plus près et je vous en suis reconnaissant...
Les inscriptions qui sont inscrites sur le coffre sont de très vieilles runes. J'ai quelques connaissances en la matière et j'ai pu traduire approximativement ces runes.
Ce coffre est la porte qui a permis aux créatures de la forêt de passer de l'Au-Delà à notre monde..."

Helio avait soif. C'étais la première fois de sa vie qu'il parlait autant d'un coup, alors il avait la gorge sèche et se sentait mal à l'aise.
Il parvint avec difficulté à parler.

"Aussi, je dois vous demander quelque chose... J'espère sincèrement que vous comprendrez et que vous accepterez..."

Merin se leva brutalement de sa chaise, l'interrompant.

"Ne me dites pas que vous voulez le détruire !! C'est hors de question !"

Il empoigna le cofre avec vigueur, mais le relâcha aussitôt avec un cri de douleur.

"Ca brûle !!!!"

Le coffre avait en fait l'air d'être complètement gelé, subitement. Le froid avait été si intense qu'il avait brûlé la peau du bras droit de Merin, qui resta pantois, et ne su plus que dire.

[HJ : SORCIERE BLANCHE PAWAAAAAA ]

Helio eut un sourire légèrement ironique et regarda Merin dans les yeux.

"Si. C'est exactement ce que je voulais vous demander..."

Son visage redevint à nouveau grave et il tourna à nouveau son regard sur le coffre.

*Mais ça va être peut-être plus dur que prévu...*

"Alors? Refusez-vous toujours?"

Son ton était net et tranchant. On pouvait deviner qu'il n'admettrait qu'une seule réponse...

En un instant, le coffre était redevenu normal. Merin aurait peut-être réussi à se convaincre qu'il ne s'agissait que d'une illusion, si seulement sa main ne continuait pas à le faire souffrir.

Hébété, il regardait le druide, puis le coffre, puis de nouveau le druide, et ainsi de suite.

Malgré tout, une chose était sûre et il n'en démordrait pas : il était hors de question qu'il laisse le druide détruire ce coffre. Lorsqu'il fut capable de parler calmement, il dit : " Je ne sais pas d'où vous venez, ni qui vous êtes, et encore moins de quoi vous êtes capable. Et, au fond, ilen est de même pour ce coffre. Qui me dit qu'il ne s'agit pas de quelque chose de très important qu'il faut conserver pour la sécurité de tous, et qu'il faut éviter de détruire ? Peut-être n'êtes-vous pas digne de confince. Comment le saurais-je ?

Je veux en savoir plus sur ce coffre, sur ces histoires de démons femelles qui habitent dans cette forêt, et sur vous, aussi. Sans quoi je ne vous laisserai pas l'approcher."

Il avait essayé d'avoir l'air déterminé, mais en réalité il était complètement affolé et comprenait à peine ce qu'il disait. Il lança un regard farouche au druide, en espérant que cela l'intimiderait.

Seulement, cela n'impressionnait nullement le druide, comme on pouvait s'y attendre. Helio avait à peine conscience que Merin cherchait à l'intimider, tellement il était concentrer sur son but : détruire le coffre.
Il sentait un sentiment de frustration monter en lui. Il ne savait pas comment convaincre Merin. Et il ne comprenait pas vraiment en quoi le fait d'en savoir plus sur les créatures de la forêt, le coffre et lui-même ferait avancer les choses.
Cependant, il savait qu'il devait détruire le coffre et pour cela, il n'avait pas vraiment le choix.

"Je ne vois pas où vous voulez en venir, mais posez vos question. J'essaierais d'y répondre de mon mieux..."

Merin commençait à s'affoler un peu. Il n'avait pas du tout impressionné le druide et celui-ci semblait montrer quelques signes d'agacement...
Il décida alors de gagner un peu de temps pour trouver une solution à tout ceci en posant toutes les questions qui lui venaient à l'esprit.

"Que viennent faire ces démons ici ? Et comment les connaissez-vous ? Si ce coffre est bien ce que vous me dites, que faisait-il ici ? Qui l'y aurait déposé ? Qu'y aurait-il dedans ? Pourquoi faudrait-il le détruire ? Comment voulez-vous le détruire ? Quelles en seraient les conséquences ?"

Il commençait à s'essoufler et à hausser le ton.

"Avez-vous prévenu les autorités de cette affaire ? Comment puis-je avoir conscience en vous ? Qu'allez-vous faire si je refuse de vous céder ce coffre ? Pourquoi est-il devenu glacé et pourquoi a-t-il brûlé ma main alors qu'il n'avait jamais fait quoi que ce soit avant ? Et pourquoi, bon sang de bonsoir, voulez-vuos à tout prix le détruire ???"

Il avait fini en hurlant, sans s'apercevoir qu'il devenait au fur et à mesure de son monologue complètement écarlate.

Helio ouvrit de grands yeux ronds, interloqué. Le boulanger semblait sérieusement perturbé. Cela en faisait des questions...
Helio croisa les bras sur sa poitrine et fronça les sourcils. Il devait répondre, comme promis aux questions de Merin, mais il n'était pas sûr de pouvoir toutes se les rappeler...

"Je vais... essayer de vous répondre... Ces démons viennent en notre monde, poussé par la faim, pour se nourir.
Je tiens mon savoir d'autres druides et de discussions avec les esprits de la nature. Mais je ne pourrais pas vous décrire entièrement en quoi consiste mon métier, ce serait trop long.
Je ne sais pas ce que ce coffre fait ici, qui l'a amené ni pourquoi, ni comment. Ce sont des questions dont j'aimerais trouver les réponses, moi aussi.
Il n'y a sûrement rien de matériel dans ce coffre. Et peut-être même rien de visible, je ne sais pas. Je ne suis pas spécialiste en Nécromancie et heureusement pour Voxifera...
Il faut le détruire car c'est le seul moyen efficace de supprimer la porte entre notre monde et l'Au-Delà. Je compte le détruire à l'aide de sortilèges. Cela aura pour conséquences un beau feu d'artifice et la supression de la porte et éventuellement des créatures qui sont déjà dans la forêt, mais je n'en suis pas sûr.
Comme je vous l'ai déjà dit, les autorités sont prévenues.
Je ne sais pas comment vous pourriez me faire confiance. Peut-être pourriez-vous demander une audience au Roi et à la Reine... Je ne sais pas si elle sera acceptée et cela nous fera perdre encore plus de temps. Mais s'il faut en passer par là, nous en passerons par là.
Si vous ne voulez pas me céder le coffre, je commencerais par prévenir les autorités, après, je ne sais pas...
Le fait que le coffre vous ait brûlé la main est sûrement du à un sort de protection.
Enfin, la dernière question que vous m'avez posée, j'y ai déjà répondu pour la simple et bonne raison que vous me l'avez déjà posée."

Helio sentait la moutarde lui monter au nez. Bien qu'il eut répondu calmement à toutes les questions de Merin, il avait du recommencer un long discours et il commençait à en avoir assez de parler.